Commission de l’Enseignement, des Affaires culturelles, de la Francophonie et de l’audiovisuel extérieur de l’état  

Audition de Mme Claudia Scherer-Effosse, Directrice de l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Etranger 

 

 

Bilan de la rentrée scolaire 2024 dans les établissements français à l’étranger en gestion directe

  1. Effectifs globaux :
Effectif global élèves Evolution nombre élèves Pourcentage évolution nombre élèves
Rentrée 2019 368 684
Rentrée 2020 367 989 -695 -0,2%
Rentrée 2021 376 895 +8 906 +2,4%
Rentrée 2022 387 593 +10 698 +2,8%
Rentrée 2023 392 303 +4 710 +1,2%
Rentrée 2024 397 766 +5 463 +1,4%
Evolution 19-24 +29 082 +7,9%

 

A la rentrée 2024, les 600 établissements du réseau de l’AEFE totalisent 397 766 élèves soit une augmentation de 1,4% par rapport à la rentrée 2023 (contre une augmentation de 1,2% à la rentrée 2023). Cette hausse est portée, comme l’année précédente, par les élèves nationaux (+2%) et les élèves des nationalités tierces (+1,4%). Par rapport à la rentrée 2019 (ante Covid), l’augmentation de l’effectif global est de 7,9% avec de fortes croissances pour les élèves nationaux (+14%) et les élèves des nationalités tierces (+12,8%) démontrant encore une fois l’attrait du système scolaire français dans le monde et l’intérêt que nous avons à le développer. Les effectifs d’élèves français progressent de 0,2% cette année mais ne retrouvent pas leur niveau d’avant le Covid. En effet, on enregistre une baisse de 3,6% par rapport aux effectifs de la rentrée 2019.

Si l’on s’intéresse plus particulièrement aux EGD, les évolutions suivantes sont constatées.

Effectif global élèves Evolution nombre élèves Pourcentage évolution nombre élèves
Rentrée 2019 74 937
Rentrée 2020 73 948 -989 -1,32%
Rentrée 2021 75 483 +1 535 +2,08%
Rentrée 2022 75 667 +184 +0,24%
Rentrée 2023 74 968 -699 -0,92%
Rentrée 2024 73 960 -1 008 -1,34%
Evolution 19-24 -977 -1,30%

 

19% des élèves sont scolarisés dans les 68 établissements en gestion directe, comme à la rentrée 2023. On note cependant une perte de 1 008 élèves (-1,3%) en partie expliquée par la fermeture du lycée de Niamey (238 élèves) et la crise en Turquie (176 élèves). L’école française de Téhéran étant passé d’établissement conventionné à EGD, elle apporte 75 élèves dans cette catégorie. Cependant, seuls huit EGD connaissent une augmentation de leurs effectifs à la rentrée 2024.

  1. Effectifs des EGD par secteur

 

AOC AOOI Amér. Asie Europ nord Europe sud Maghr. MOPO TOTAL
Rentrée 2019 4 405 2 837 1 409 3 574 15 863 15 390 27 706 3 753 74 937
Rentrée 2020 4 499 2 664 1 387 3 376 15 564 15 143 27 586 3 729 73 948
Rentrée 2021 4 589 2 673 1 349 3 336 16 737 15 157 27 897 3 745 75 483
Rentrée 2022 4 646 2 635 1 341 3 502 16 483 15 244 28 019 3 797 75 667
Rentrée 2023 4 081 2 609 1 346 3 526 16 353 15 137 28 089 3 827 74 968
Rentrée 2024 3 843 2 585 1 338 3 579 16 197 14 757 27 860 3 801 73 960
Evolution 23-24 -5,83% -0,92% -0,59% 1,50% -0,95% -2,51% -0,82% -0,68% -1,34%
Evolution 19-24 -12,76% -8,88% -5,04% 0,14% 2,11% -4,11% 0,56% 1,28% -1,30%

 

Afrique occidentale et centrale (AOC)

Les trois EGD perdent 238 élèves (-5,83%) ce qui correspond à l’effectif de l’EGD de Niamey qui a fermé ses portes après une année d’enseignement à distance. L’EGD de Nouakchott poursuit sa progression (+3,5%) grâce à un contexte favorable, l’état mauritanien ayant décidé en 2022 d’interdire tout enseignement privé non mauritanien à l’exception de l’enseignement français de l’EGD. Quant à l’EGD de Dakar, une baisse des effectifs de 1,8% est relevée principalement sur les niveaux CP et CE1 car les familles privilégient une école plus proche de chez eux et moins onéreuse avant d’intégrer le lycée Jean Mermoz en cycle 3.

Afrique orientale et Océan indien (AOOI)

Le secteur ne comporte plus qu’un seul EGD, le lycée français de Tananarive. La baisse des effectifs se poursuit (-0,99% en 2023 et -0,91% en 2024). Cela s’explique en grande partie par le montant des frais de scolarité qui sont deux voire trois fois plus importants que ceux des établissements partenaires de la capitale. Avec une classe moyenne qui diminue et qui subit la crise économique, les familles sont très attentives au coût de la scolarité.Une analyse par typologie des élèves montre que la baisse des effectifs est surtout due à une diminution des élèves français. La situation économique du pays, la déliquescence des infrastructures, expliquent en grande partie cette baisse.

La baisse des effectifs de l’école primaire française A est contenue cette année (-7 élèves pour -20 élèves entre 2022 et 2023). La situation reste préoccupante mais la direction de l’école s’est engagée dans une démarche active pour relancer une dynamique positive et enrayer cette baisse des effectifs en grande partie liée à la paupérisation de la population habitant dans le secteur de l’école.

Amériques

Le seul EGD du secteur, le lycée franco argentin Jean-Mermoz de Buenos Aires, scolarise sensiblement le même nombre d’élèves qu’à la rentrée 2024 (-8 élèves pour 1 338 élèves au total). On constate des variations dans tous les cycles du secondaire dues essentiellement aux déplacements des parents mais aussi à la crise économique.La baisse à cette rentrée est sur le second degré (-12 élèves) alors que le primaire augmente sensiblement (+4).Si on s’intéresse aux dernières années, le primaire perdait des élèves jusqu’à la rentrée 2022. Ensuite la dynamique s’inverse au détriment du secondaire.Notons toutefois qu’il s’agit de variations minimes au regard du nombre total d’élèves scolarisés (1 338 élèves) dans cet EGD.

 Asie

Quatre EGD scolarisent 15,1% des élèves du secteur contre 15,5% l’an dernier. Les deux EGD du Vietnam sont en croissance, +0,9% à Hanoi et +4,0% à Ho Chi Minh Ville, avec respectivement 1 169 et 1 195 élèves. A Pékin, légère reprise de +0,5% avec 800 élèves. Seul Pondichéry est en baisse de 1,9% avec 415 élèves mais au même niveau qu’en 2022.

Europe du nord

Les effectifs des établissements en gestion directe reculent d’un point. Il faut cependant relativiser puisque huit établissements sur les dix-sept EGD de la zone enregistrent une progression allant de 0,24% à 9,25%, meilleur score enregistré par l’annexe d’Amsterdam du lycée Van Gogh, aux Pays Bas. Cet établissement, localisé dans un quartier de plus en plus attractif, gagne 16 élèves à la rentrée, contrairement au lycée de La Haye qui voit ses effectifs diminuer de 39 élèves (soit -4,21%). Ce sont précisément, les établissements qui portent de grosses structures, en gestion directe, qui perdent des effectifs, comme par exemple à Bruxelles (-113 élèves à la rentrée au lycée français Jean Monnet), avec une exception pour le lycée Français Charles de Gaulle à Londres qui reste attractif compte tenu des frais de scolarité très élevés, pratiqués par les établissements partenaires au Royaume-Uni.Une hypothèse serait que les familles qui font le choix d’un enseignement privé, payant, soient en recherche d’un service individualisé pour leur enfant et d’une communauté de parents à taille humaine et qu’à ce titre, ils auraient tendance à se détourner des grosses structure.

Par ailleurs, en Europe du Nord, le système public national d’enseignement est souvent de bonne qualité et gratuit, ce qui pourrait expliquer que certaines familles de classes moyennes se détournent de nos EGD. C’est par exemple une explication possible en Allemagne pour les établissements de Munich qui perdent 48 élèves à cette rentrée (soit une baisse de -3,96% des effectifs) ou le lycée de Berlin qui en perd 23 (-3,26%).

Le développement rapide de la concurrence d’autres établissements internationaux offrant des infrastructures modernes et des outils innovants, qui appartiennent souvent à des groupes privés, prêts à investir dans des techniques de communication et de marketing agressives, pourrait également expliquer en partie la baisse des effectifs en EGD. En Pologne par exemple, l’attente d’un projet de rénovation des bâtiments semble jouer en faveur d’une école anglo-saxonne concurrente, en grande proximité géographique du Lycée Français de Varsovie.

Concernant les EGD qui affichent un solde positif d’évolution des effectifs à la rentrée, il faut parfois relativiser. Certains établissements affichent, ce qui ressemble à une hausse artificielle : on peut citer le lycée Alexandre Dumas de Moscou qui enregistre une hausse significative d’une cinquantaine d’élèves mais également relative puisque ce même établissement a perdu massivement des élèves au début du conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine (1 128 élèves en 2021-2022 contre 644 à la rentrée 2024). De la même façon, les effectifs en hausse du lycée franco-allemand de Sarrebrück en Allemagne de 3,58% à la rentrée cache une réalité qui est celle d’élèves français qui font le choix de traverser quotidiennement la frontière pour bénéficier d’un enseignement bilingue et biculturel de qualité.

Comme dans d’autres secteurs, la tendance générale qu’on observe en Europe du nord pour les EGD est celle de la baisse des effectifs de nationalité française au profit des élèves nationaux ou de nationalité tierce (9 478 élèves français en 2024 contre 9 663 en 2023).

Europe du sud

En Italie, le lycée Chateaubriand de Rome connaît une baisse importante de ses effectifs (- 51 élèves par rapport à la rentrée 2023). Ce sont des proportions qui n’avaient pas été observées ces dernières années. Cette situation est liée en partie à la démographie et aux difficultés de recrutement sur les classes de maternelle.

Paradoxalement, cette baisse des effectifs va avoir un impact positif sur la gestion des espaces, la situation immobilière exigeant des adaptations au-delà de 1 500 élèves. Dans une moindre mesure, il en va de même pour l’EGD de Milan qui perd 21 élèves en cette rentrée.

Dans un contexte de dynamique baissière globale au niveau du secteur et malgré les difficultés économiques du pays, l’EGD du Portugal maintient ses effectifs constants (+0,2%). Il est au maximum de ses capacités d’accueil et souvent tenu de refuser des inscriptions. Ceci laisse penser qu’il y a sans doute dans le pays un potentiel de développement à exploiter. Depuis l’été 2024, les tensions politiques entre la France et la Turquie ont eu un impact négatif significatif sur les établissements scolaires français en Turquie, notamment le lycée Charles de Gaulle à Ankara. L’interdiction d’inscriptions pour de nouveaux élèves détenteurs de la nationalité turque dans ces établissements, impacte leur avenir et leurs effectifs. Le lycée français Charles de Gaulle d’Ankara a ainsi perdu 176 élèves à la rentrée 2024 par rapport à la rentrée 2023.

Les élèves turcs déjà inscrits ont pu continuer leur scolarité, mais la mesure exclut ceux qui auraient intégré le système scolaire après le 1er janvier 2024, menaçant ainsi la viabilité des établissements à moyen et long terme.

Maghreb

Les 28 établissements en gestion directe accueillent 40% des élèves au Maghreb. On observe globalement une diminution de 229 élèves.

Les EGD de Tunisie perdent 92 élèves (-1,4%) avec une baisse notable des élèves français (5,5% soit 167 élèves) en partie compensée par l’arrivée de nouveaux élèves tunisiens (75 soit 2,3%).

En Algérie, une augmentation des effectifs de l’EGD et ses annexes : + 163 élèves (+7,5%)

  • + 113 élèves pour l’annexe d’Oran (+41,5%)
  • + 13 élèves pour l’annexe d’Annaba (+12,4%)
  • + 37 élèves pour les sites 1er et 2nd degré d’Alger (+2,34%).

Au Maroc, nous observons pour les EGD une perte d’environ 300 élèves soit une baisse de 1,5%. Cette baisse s’explique par une diminution des 392 élèves nationaux (-4,2%) qui s’observe principalement dans le premier degré (-169 nationaux en maternelle et -209 nationaux en élémentaire). Dans le même temps, 90 élèves français (+0,9%) ont rejoint ces EGD.Pour chaque pole, le différentiel entre les effectifs constatés dans le cadre des enquêtes annuelles 2023 et 2024 est le suivant :

Le tableau ci-dessus illustre parfaitement une problématique forte au Maroc, à savoir l’érosion des effectifs en élémentaire et en maternelle marquée dans plusieurs EGD. Cette érosion est forte et inquiétante à Casablanca et à Rabat. La concurrence internationale et locale se renforce. Si un parent décide de changer de cap pour la scolarité de son enfant, il a intérêt à le faire avant le CE2. La baisse des effectifs de l’école primaire de Tanger est conjoncturelle (Berchet en travaux).

MOPO

La zone accueille désormais trois EGD, suite à la transformation statutaire de l’école française de Téhéran décidée par l’agence pour permettre sa survie, menacée par une application plus stricte de la loi à l’égard des écoles internationales. La fréquentation globale affiche ainsi une légère hausse (+1,28%), qui masque la diminution de 73 élèves du lycée français du Caire (-3,5%) et, dans une moindre mesure, celle de 28 élèves du lycée Louis Massignon à Abu Dhabi (-1,6%) essentiellement à l’école maternelle. Le paiement en euros des frais d’inscription au lycée français du Caire combiné aux dévaluations successives de la livre égyptienne rend la situation difficile pour les familles, mais une politique d’attractivité renouvelée est mise en œuvre pour y remédier.

Le séminaire annuel des EGD, qui se tiendra du 7 au 9 avril 2025, réunira au siège de l’AEFE les chefs d’établissement, les secrétaires généraux et les agents comptables secondaires. Il sera l’occasion de définir une typologie des raisons de la baisse des effectifs dans cette catégorie d’établissements et des actions à mettre en œuvre pour l’enrayer.